Ayez bon jour, vous qui lisez ces lignes !
J’initie en cette belle journée une entreprise d’écriture qui a pour modeste but de vous montrer en quoi la période médiévale est fascinante. Je suis moi-même médiéviste — nous reviendrons sur ce terme —, et à l’heure ou j’écris, en deuxième année de thèse. Si tout se déroule à merveille et que je parviens à vous transmettre ce que je souhaite, vous pourrez trouver sur ce site moult sujets et une variété d’articles. Je vous parlerai autant de culture médiévale que de linguistique, je vous présenterai mon travail qui porte sur la chirurgie du XIVe siècle… Ne partez pas ! Je vous assure, c’est intéressant. Vous trouverez également des comptes-rendus de livres et d’articles : certains porteront sur ma thèse, d’autres sont des ouvrages qui attendent dans ma bibliothèque depuis quelques années, et que je n’ai toujours pas lus. Je parlerai aussi littérature, en vous présentant de grands et moins grands classiques de la littérature médiévale, qui est souvent peu connue et réduite à Chrétien de Troyes[1]Un auteur dont j’adore les œuvres, ne nous méprenons pas. Mais bon nombre d’entre nous ne connaît de la littérature médiévale qu’une seule de ses œuvres, qu’il s’agisse d’Yvain, Lancelot ou Perceval : ce n’est pas révélateur de la littérature médiévale dans son ensemble, qui est beaucoup plus riche que les simples légendes arthuriennes..
Bien sûr, je ne prétends pas avoir la science infuse en ce qui concerne la période médiévale. Tout d’abord, mon regard est biaisé, car ce que j’en connais se limite à une partie historique et géographique : des mille ans que constitue cette époque de notre histoire, je n’ai travaillé que sur le Moyen Âge français du XIIe au XIVe… C’est donc une perspective réduite, mais j’ai soif d’en savoir plus. J’espère donc pouvoir vous transmettre ce que je sais, et vous faire découvrir avec moi tout ce que j’apprends.
Pour commencer sur de bonnes bases, il va falloir que vous reteniez quelque chose. Il est formellement déconseillé d’utiliser le terme moyenâgeux face à un médiéviste. Cela risque de le mettre dans une rage folle. Mais pourquoi cette hargne ? Prenons ensemble la définition de médiéviste :
Médiéviste (substantif) : spécialiste du Moyen Âge ou de l’un de ses aspects (histoire, civilisation, langue, littérature, musique, etc.)[2]La source pour cette définition, ainsi que pour toutes celles de cet article et certainement des suivants, sauf indication contraire, est le Trésor de la Langue Française informatisé, que vous pourrez trouver en ligne aux côtés d’autres dictionnaires anciens et modernes à l’adresse suivante : https://www.cnrtl.fr/
Vous conviendrez que l’on devient rarement spécialiste de quelque chose que l’on n’apprécie pas. En ce sens, le médiéviste est généralement un passionné du Moyen Âge. Pourquoi alors ne pas dire moyenâgeux ? Regardons les définitions suivantes :
Médiéval (adj.) :
- Qui est relatif à la période appelée Moyen Âge
- Qui présente certains aspects, certains caractères, rappelant ou évoquant le Moyen Âge.
Moyenâgeux (adj.) :
- Du Moyen Âge, relatif au Moyen Âge.
- Qui évoque les formes, les mœurs de la civilisation médiévale.
Si les deux termes semblent de prime abord avoir le même sens, toute la nuance tient dans cette petite remarque, que le dictionnaire ajoute à la définition de moyenâgeux :
Par opposition à médiéval qui est neutre, moyenâgeux implique souvent un jugement péjoratif.[3]Je découvre lors de l’écriture de cet article que le terme médiéval peut être employé de manière ironique avec une nuance péjorative. Je ne l’ai jamais entendu utilisé comme tel, mais je me devais de le mentionner, question d’honnêteté intellectuelle. Vous saurez donc que, malgré le fait que j’adule cette période fantastique, exceptionnelle, et mirifique, je suis capable d’objectivité. Et d’ironie.
Moyenâgeux est en effet plus souvent utilisé pour décrier la période médiévale que pour la décrire. Si le terme médiéval est utilisé de manière purement descriptive, l’adjectif moyenâgeux est favorisé lorsque le locuteur souhaite insister sur l’obscurantisme de l’époque. Faudra-t-il aller loin pour trouver un exemple de journaliste qui citera « des pratiques moyenâgeuses », ou un commentaire Facebook qui dénoncera un « procédé moyenâgeux », arguant ainsi du caractère arriéré et rétrograde desdits pratiques et procédé ? Ce que médiéval apporte au médiéviste d’objectivité pour décrire et analyser, moyenâgeux lui retire, en jetant sur le Moyen Âge un regard obtus, figé, qui réduit cette période et ses caractéristiques à un imaginaire obscur et cliché : celui d’un âge sombre (the Dark Ages en anglais), un âge de famine, de guerres, d’analphabétisme, d’obscurantisme religieux et de crasse.
Alors si vous pensez que le Moyen Âge se résume en la personne de Jacquouille la Fripouille, vous utilisez certainement le terme moyenâgeux. Mais si vous avez l’intuition qu’il y a plus à dire sur ce millénaire de notre histoire que le portrait d’un homme stupide et qui sent la bouse, bravo ! Vous êtes sur la bonne voie contre les clichés, et je suis heureuse de vous compter dans mon public averti. Bannissez de votre vocabulaire ce terme crasseux qu’est moyenâgeux, ici on dira médiéval pour que je ne grince plus des dents en écrivant.
Mais alors pourquoi ce nom : La moyenâgiste ? Je l’ai découvert en réfléchissant au nom que je pouvais donner à ce blog. J’ai longuement hésité à appeler le site médiévalismes, ou médiévismes, avant de m’orienter vers quelque chose de plus individualisé grâce à cet article « la » qui me désigne, et qui me permet de vous parler de Moyen Âge, mais aussi dans une perspective plus égotique, de moi, de mon parcours et de ce qui m’intéresse. Et pourquoi pas La médiéviste, me demanderez-vous ? Je ne me prétends ni linguiste, ni littéraire, ni historienne : je ne suis pleinement aucune des trois, mais je suis un peu de chaque à la fois. C’est pourquoi, quand on me demande ce que je fais dans la vie, je dis généralement que je suis médiéviste : le terme, comme nous l’avons vu, a l’avantage de lier tous ces domaines d’études autour du pivot central qu’est le Moyen Âge. Cependant, quand je dis médiéviste, je pense Georges Duby, Jacques Le Goff, Michel Zink, Paul Zumthor, Régine Pernoud, Michel Pastoureau… Les grandes autorités[4]Si vous ne connaissez aucun des noms de cette liste, pas d’inquiétude, je vous les présenterai dans de futurs articles.. Face à eux, j’ai l’impression d’être une médiéviste en herbe, débutante. Une apprentie médiéviste, en quelque sorte. Vous le comprenez, je vois dans la figure idéale du médiéviste celle d’un spécialiste accompli, détenteur d’un grand savoir. Le moyenâgiste, dont voici la définition, est en mon sens en chemin vers ce savoir :
Moyenâgiste (adjectif et substantif) : (Personne) qui admire ou étudie le Moyen Âge.
Choisir comme titre de ce blog le terme moyenâgiste, dérivé du moyenâgeux que j’abhorre, c’est pour moi une manière de faire un pied-de-nez aux clichés sur la période médiévale, et à tous ceux qui utilisent moyenâgeux pour son caractère péjoratif.
C’est me réapproprier le terme dont il est dérivé, l’apprivoiser, m’en servir pour le détourner à mon avantage. C’est, d’un mot qui m’est insupportable parce qu’il jette un sombre voile de dédain sur ma passion, faire naître quelque chose de positif, plaisant et lumineux.
C’est m’identifier au caractère imparfait qu’il sous-entend, à ce cheminement et cet apprentissage qui me caractérisent.
C’est mon point de départ sur ce chemin, sur le terrain d’expérimentation et d’écriture qu’est ce blog, avec pour but la fierté de pouvoir me clamer médiéviste, spécialiste du Moyen Âge.
Alors, voulez-vous cheminer avec moi ?
Médiévalement vôtre[5]Celui-là, c’est moi qui l’invente.,
La Moyenâgiste.
Notes
↥1 | Un auteur dont j’adore les œuvres, ne nous méprenons pas. Mais bon nombre d’entre nous ne connaît de la littérature médiévale qu’une seule de ses œuvres, qu’il s’agisse d’Yvain, Lancelot ou Perceval : ce n’est pas révélateur de la littérature médiévale dans son ensemble, qui est beaucoup plus riche que les simples légendes arthuriennes. |
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↥2 | La source pour cette définition, ainsi que pour toutes celles de cet article et certainement des suivants, sauf indication contraire, est le Trésor de la Langue Française informatisé, que vous pourrez trouver en ligne aux côtés d’autres dictionnaires anciens et modernes à l’adresse suivante : https://www.cnrtl.fr/ |
↥3 | Je découvre lors de l’écriture de cet article que le terme médiéval peut être employé de manière ironique avec une nuance péjorative. Je ne l’ai jamais entendu utilisé comme tel, mais je me devais de le mentionner, question d’honnêteté intellectuelle. Vous saurez donc que, malgré le fait que j’adule cette période fantastique, exceptionnelle, et mirifique, je suis capable d’objectivité. Et d’ironie. |
↥4 | Si vous ne connaissez aucun des noms de cette liste, pas d’inquiétude, je vous les présenterai dans de futurs articles. |
↥5 | Celui-là, c’est moi qui l’invente. |
Un article d’une grande qualité.
Biaus sire, grant merci !
Chère Moyenâgiste,
Les qualités de ta plumes ne m’étaient étrangères, je ne n’en suis pas moins ébaubie après la lecture de cet article. J’ai déjà commencé à apprendre des choses, je me régale. 👌🏻
Quel plaisir de lire ce premier article ! j’attends la suite avec impatience et je transmet cet article à mes ami(e)s….
J’ai toujours été passionnée par le Moyen-Age et je découvre avec plaisir que j’avais raison.
Si j’avais vécue à cette époque cela n’aurait pas été facile pour moi, car j’utilise depuis très longtemps les plantes sauvages pour leurs vertus médicinales et culinaires… de là à être traitée de sorcière ! Et, de plus, je n’adhère à aucune religion…. et espère surtout en l’ouverture d’esprit, la tolérance, la transmission des connaissances… Alors ? merci de partager avec nous cette partie de notre histoire qui nous fait ce que nous sommes maintenant !
L’image de la sorcière fera certainement l’objet d’un article, ainsi que l’utilisation des plantes en médecine – et en chirurgie ! Quant à l’idéal d’ouverture d’esprit, de tolérance et de transmission, il est bien plus présent que l’on peut le croire : science et religion ne sont pas opposés au Moyen Âge, j’aurai l’occasion d’en discuter à propos de la médecine !
De quoi, les « simples légendes arthuriennes » ?! Je proteste, elles ne sont pas simples du tout, mes migraines de mémoire peuvent en témoigner ;p
Mais je te taquine, j’ai compris l’idée.
Dex vos gart, vostre blog et vos <3
L’adjectif ne se voulait pas réducteur, mais leur unique connaissance (et partielle de surcroît) quand on pense littérature médiévale l’est bel et bien 😉 Peut-être m’aideras-tu pour un futur article sur le Perceforest ? M’amie, grant merci !
A vostre service, gente dame. Ma plume est vostre !